Depuis début 2022, les organismes de formation qui ont une ou plusieurs offres éligibles au CPF vivent au grés des contrôles et ajustements réglementaires
– d’abord, par la clarification dans l’utilisation des certifications professionnelles (RNCP et RS) – certains organismes utilisaient sans autorisation des certifications professionnelles pour rendre leur parcours de formation éligibles au CPF ; ces déréférencements ont également été menés pour les actions enregistrées de droit, comme la création et reprise d’entreprise ou encore le bilan de compétences, qui étaient utilisées à tort et à travers (voir notre article « il faut sauver le soldat CPF »)
– ensuite, par la proposition de loi « visant à lutter contre la fraude au compte personnel de formation et à interdire le démarchage de ses titulaires » présentée à l’assemblé début octobre, qui propose :
- de dire stop aux appels, sms et autres actions commerciales, excessives et pour certaines, trompeuses (voir notre article « Actu formation – Zoom sur 3 infos clés de la rentrée 2022 »)
- de renforcer les dispositifs d’identification et d’inscription sur la plateforme Mon Compte Formation ; en découle l’utilisation généralisée de France Connect+ pour les utilisateurs, et une procédure d’inscription renforcée pour les organismes de formation
- enfin, et c’est le sujet qui nous intéresse aujourd’hui,l’amendement du 03 octobre dernier, qui souhaite encadrer la sous-traitance dans le cadre de l’utilisation des fonds CPF, en exigeant, je cite, que « les sous-traitants devront respecter les mêmes conditions que celles exigées du donneur d’ordre »
Essayons d’y voir plus clair 👇
Quelles sont les raisons de cet amendement ? Quel rapport avec Qualiopi ?
A noter que nous ne sommes ni juristes, ni avocats en droit du travail et/ou de la formation ; notre article vise à donner une interprétation et une réflexion personnelle de la lecture de plusieurs textes réglementaires, sans vocation à être exhaustif, exclusif ou encore à se substituer de quelques manières que ce soit, aux services de professionnels du droit et de la justice.
Un amendement, pour rappel, est un droit constitutionnel dont dispose les membres du Parlement et le Gouvernement pour proposer des modifications à un texte (projet ou proposition de loi ou de résolution) devant l’Assemblée nationale et le Sénat (source : https://www.senat.fr/)
Le 03 octobre dernier, le Gouvernement a proposé un article additionnel, le futur Art. L. 6323-9-2, en expliquant, dans le cadre d’un exposé sommaire, les raisons de cet ajout
Les constats :
- Plus de 16 000 organismes de formation inscrits sur la plateforme EDOF (source : Caisse des Dépôts et des Consignations au 15 septembre 2022)
- Les organismes référencés ont le droit de recourir à la sous-traitance pour réaliser les actions éligibles à Mon Compte Formation (dit « MCF »)
- Ces mêmes sous-traitants n’ont pas l’obligation d’être référencés sur la plateforme ; ils ne sont pas identifiés par la Caisse des Dépôts et des Consignations, alors qu’ils peuvent faire bénéficier leurs clients du CPF
- Certains organismes utilisent de manière systématique la sous-traitance
- Certains organismes « promettent » des accès au CPF en 24h aux sous-traitants qu’ils portent
Les conclusions :
- Une complexité dans le contrôle de l’action de formation et de l’organisme
- Une possible atteinte à la qualité de l’action de formation dispensée par manque de régulation (certains OF ne maitrisent pas le contenu de formation qu’ils dispensent puisqu’ils « portent » des formateurs sous-traitants pour qu’ils accèdent au fonds CPF qu’ils valident en moins de 24h)
- Un manque de transparence pour l’utilisateur final (il ne sait pas réellement qui va le former)
La décision qui en découle : « les sous-traitants devront respecter les mêmes conditions que celles exigées du donneur d’ordre afin d’être référencés sur la plateforme Mon Compte Formation. En cas de manquement du sous-traitant, le donneur d’ordre pourra être déréférencé »
Finalité souhaitée « rendre les organismes de formation transparents et responsables de la qualité de leurs sous-traitants, d’une part en les déclarant à la Caisse des dépôts et consignations et d’autre part, en interdisant le portage Qualiopi. »
En d’autres termes, à quoi s’attendre ? Je suis sous-traitant, devrais-je passer Qualiopi ?
L’article L. 6323-9-2, qui complète la section 1 du chapitre III du titre II du livre III de la sixième partie du code du travailstipule :
« Le prestataire mentionné à l’article L. 6351-1 peut confier, par contrat et sous sa responsabilité, l’exécution des actions mentionnées à l’article L. 6323-6 dans des conditions définies par voie réglementaire, à un sous-traitant. Le sous-traitant doit avoir préalablement procédé à la déclaration prévue à l’article L. 6351-1 et justifier du respect des conditions mentionnées aux 1° , 2° , 3° et 5° de l’article L. 6323-9-1. »
« Lorsqu’une ou plusieurs conditions mentionnées aux 1° , 2° , 3° et 5° de l’article L. 6323-9-1 cessent d’être remplies par le sous-traitant, la Caisse des dépôts et consignations, après avoir mis en demeure le prestataire mentionné au premier alinéa selon des modalités fixées par voie règlementaire, procède au déréférencement du prestataire. »
« Un décret en Conseil d’État précise les modalités de mise en œuvre du présent article. »
Ce que l’on comprend
– un sous-traitant qui exercera pour le compte d’un prestataire bénéficiant d’offres éligibles au CPF (voir article L 6323-6 cité)devra :
* avoir signé un contrat avec le prestataire qui définit les rôles et les responsabilités (… peut confier, par contrat et sous sa responsabilité, l’exécution des actions…)
* avoir un Numéro de Déclaration d’Activité (il s’agit de la référence à l’article L 6351-1)
* respecter les conditions de l’article L 6323-9-1 qui précisent les exigences pour être référencés par la Caisse des Dépôts et des consignations soit :
1° – « Les prestataires mentionnés à l’article L. 6351‑1 adressent à la Caisse des dépôts et consignations une demande de référencement sur le service dématérialisé mentionné au I de l’article L. 6323‑8. » (en d’autres termes, un accès à EDOF)
2° – « De satisfaire aux conditions d’exercice dans le cadre du service dématérialisé, notamment à celles liées à l’éligibilité des actions prévues à l’article L. 6323‑6 et à celles liées à la détention des autorisations et certifications nécessaires ainsi que des habilitations délivrées par les ministères et organismes certificateurs mentionnés à l’article L. 6113‑2 » (en d’autres termes, être habilités par un organismes certificateurs si vous avez des offres au RS/RNCP ou satisfaire aux obligations des actions inscrites de droit)
3° – « De respecter les prescriptions de la législation fiscale et de sécurité sociale »
5° – « De satisfaire aux conditions prévues par les conditions générales d’utilisation du service dématérialisé prévues à l’article L. 6323‑9. » (en d’autres termes, respecter les CGU de la plateforme MCF, lesquelles exigent, entre autre, la certification Qualiopi)
Le tout précisant que le donneur d’ordre pourra être déréférencé si ces conditions ne sont pas remplies par ses sous-traitants. Les modalités d’exécutions seront connues ultérieurement (pas décret)
Comment voit-on la suite ?
Bien que nous attendons avec impatience le décret d’application, nous n’avons pu nous empêcher de faire quelques plans sur la comète.
Si nous suivons notre raisonnement, alors oui, un sous-traitant qui sera mobilisé sur des actions CPF devra avoir Qualiopi !
Cependant, nous souhaitons apporter quelques gardes fous à notre théorie
– Avant d’obtenir Qualiopi, ne pas oublier le NDA – encore aujourd’hui, de nombreux sous-traitants ne possèdent pas de Numéro de Déclaration d’Activité ; et pour cause, une clarification réglementaire s’impose à ce sujet. Pour aller plus loin, nous vous invitons à lire l’excellent article de Maitre Laurent Riquelme dans sa Chronique juridique de la formation – Octobre 2022 – « La loi évolue pour encadrer la sous-traitance dans le cadre du CPF »
– Il est nécessaire d’apporter une clarification lexicale quant à l’expression « portage qualiopi » ; par exemple, chez Opens, nous avons recours à la sous-traitance dans le cadre du bilan de compétences ; nous avons conçu le programme, nous nous occupons du marketing et de l’analyse du besoin, du suivi qualité du bénéficiaire et du sous-traitant, jusqu’au suivi à 6 mois ; nos sous-traitants – qui sont avant tout nos partenaires, à l’image de Camille que nous avons mis à l’honneur à travers une vidéo de présentation – réalisent l’ensemble de la prestation en respectant un cahier des charges, garant de la qualité de service. Je ne m’identifie pas comme une société de portage ; pour autant, je travaille avec des sous-traitants, qui ont leur NDA mais pas Qualiopi. Quid pour nos activités ? Affaire à suivre.
– Et peut on alors parler de l’indicateur 27 du Référentiel National Qualité ? « Lorsque le prestataire fait appel à la sous-traitance ou au portage salarial, il s’assure du respect de la conformité au présent référentiel » – Pourquoi ne pas le renforcer ?
En effet, en ce qui nous concerne, nous n’exigeons pas la certification qualité à nos sous-traitants, et si ils l’ont, nous ne l’intégrons pas comme pièce justificative dans le cadre de nos audits de certification. Pourquoi ? Car nous avons mis en place un système de régulation efficace et pour lequel nous sommes souverain.
Depuis plus de 3 ans, on répète qu’un audit qualité Qualiopi, c’est « contextuel », que l’auditeur doit « faire preuve d’intelligence situationnelle », qu’il doit être « ouvert aux éléments de preuve tant qu’ils permettent d’être en conformité avec les exigences du référentiel »… Je partage ce point de vue à 100% ; et c’est parce que je le partage, que je refuse d’exiger comme seul élément de preuve, une certification qualité qui va prouver que le sous-traitant respecte ses processus… mais pas les nôtres !
Conclusion
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